[En bref] Principes fondamentaux de la pensée critique

Lisez l’article complet ici : Introduction à la pensée critique

Voici quelques-uns des principes fondamentaux de la pensée critique. Ils servent de fondation à une réflexion plus poussée et priorisant les hypothèses les plus probables, en éliminant les arguments non pertinents d’un point de vue épistémique, etc.

Je les présente sommairement, sans détailler toutes leurs nuances et leur complexité, mais vous pouvez en apprendre plus dans l’article complet.

Le Rasoir d’Hitchens

Ce qui peut être affirmé sans preuve peut être rejeté sans preuve.

Si quelqu’un m’affirme “les licornes existent” sans apporter le moindre élément de preuve, je n’ai aucune raison de croire plus à leur existence qu’avant d’entendre ces propos.

Attention, il ne s’agit pas de pouvoir affirmer le contraire de l’affirmation. Si quelqu’un m’affirme “les licornes existent” sans apporter le moindre élément de preuve, le Rasoir d’Hitchens ne me permet pas d’affirmer “les licornes n’existent pas” sans preuve, bien que je puisse privilégier cette hypothèse (cf. le principe de parcimonie des hypothèses).

Le Rasoir d’Hitchens est fortement lié à l’onus probandi.

L’onus probandi

La charge de la preuve incombe à celui qui prétend.

Comme l’expliquent Richard Monvoisin et Nicolas Pinsault1 :

C’est à celui qui prétend quelque chose de le prouver et non aux autres de prouver que ce qu’il prétend n’est pas vrai.

Ce n’est pas aux critiques de Claude Vorilhon, alias Raël de prouver qu’il n’a pas pu être enlevé par des extraterrestres, mais bien à lui de démontrer qu’il l’a été. De la même façon, ce n’est pas aux critiques d’une technique de montrer qu’elle est inefficace, mais bien aux prétendants de montrer qu’elle possède l’efficacité que ceux-ci lui prêtent.

Imaginons le bazar s’il fallait prendre pour vraie toute affirmation, par exemple sur un médicament, et devoir attendre que quelqu’un montre qu’elle est fausse pour y renoncer. Tout vendeur de potions pourrait rétorquer à vos doutes : “prouvez donc que ma potion n’est pas miraculeuse”.

Il est de toute façon logiquement impossible de montrer que quelque chose n’existe pas.

Le principe de parcimonie des hypothèses (ou Rasoir d’Ockham)

Les hypothèses suffisantes les plus parcimonieuses doivent être préférées.

Il s’agit, entre plusieurs hypothèses au même pouvoir explicatif, de privilégier celle qui est la plus parcimonieuse, celle qui est la moins couteuse cognitivement, celle qui fait appel au moins d’autres hypothèses.

Cela implique que face à un phénomène encore inexpliqué, on tentera d’abord de l’expliquer à partir de ce qui est connu avant de postuler l’existence de quelque chose d’inconnu. Ou que face à trois symptômes simultanés on recherche d’abord une maladie pouvant causer ces trois symptômes plutôt que trois maladies causant chacune un symptôme.

Richard Monvoisin en donne un exemple2 :

Je mets un chat et une souris dans une boite, je ferme, je secoue, et j’ouvre : il ne reste plus que le chat.

  • Hypothèse 1 : des extraterrestres de la planète Mû ont voulu désintégrer la souris, mais elle s’est transformée en chat. Le chat, de frayeur, est passé dans une autre dimension par effet Tunnel.
  • Hypothèse 2 : le chat a mangé la souris.

Vous m’accorderez que l’hypothèse 2 est beaucoup moins couteuse intellectuellement que la N°1. Elle ne postule rien d’autre que la prédation de la souris par le chat, tandis que la première postule une planète Mû, des extraterrestres qui viennent, qui savent désintégrer un chat ce qui n’est pas donné à tout le monde, une souris qui se transforme en chat, une autre dimension, un chat qui sait y aller et un effet tunnel pour objet macroscopique. Ça fait beaucoup. Dans le doute, on choisira la 2.

Attention, il ne s’agit pas de dire que l’hypothèse parcimonieuse est vraie. En l’absence de preuve, nous ne pouvons être surs de rien. Il s’agit seulement de dire qu’il est plus sage, plus rationnel de privilégier celle-ci jusqu’à l’apparition éventuelle de nouveaux éléments probants.

Le critère de réfutabilité

Une proposition n’est recevable que si elle est réfutable.

Une proposition est réfutable s’il existe un énoncé qui lui est contradictoire, c’est-à-dire qui la falsifierait s’il se révélait vrai. Par exemple la proposition “tous les cygnes sont blancs” est réfutable, car il suffirait de trouver un cygne qui ne soit pas blanc pour l’infirmer.

Si une proposition n’est pas réfutable, alors elle n’a aucune valeur probante et n’est pas rationnelle.


  1. Pinsault, N., & Monvoisin, R. (2014). Tout ce que vous n’avez jamais voulu savoir sur les thérapies manuelles. Presses universitaires de Grenoble. 

  2. Monvoisin, R. (2007). Pour une didactique de l’esprit critique [Université Grenoble 1 – Joseph Fourier]. http://www.unice.fr/zetetique/articles/RM_Doctorat_Zetetique_et_medias.pdf